Tandis que certains se gargarisent aujourd’hui de théories fumeuses comme celle du « grand remplacement », un concept forgé par Renaud Camus pour alimenter les fantasmes identitaires et xénophobes, il est frappant de constater que le véritable grand remplacement a eu lieu bien avant.

Il s’est produit dans le sang, la violence et l’avidité : celui des peuples premiers d’Amérique du Nord, d’Amérique du Sud et d’Australie, balayés par l’expansion coloniale européenne. Et notre patrie des droits de l’homme, 2ème exportateur mondial d’armes, et premier donneur de leçons n’est pas en reste.

La conquête du Nouveau Monde et la colonisation de ces terres par des Européens avides de richesses, porteurs d’une vision suprémaciste et arrogante, ont anéanti des civilisations entières. En Amérique du Nord, les peuples autochtones ont vu leurs terres confisquées, leurs cultures détruites et leurs populations décimées par des maladies importées et des massacres. En Amérique du Sud, l’arrivée des Espagnols a provoqué l’effondrement des empires aztèque et inca, tout comme les missions portugaises ont éradiqué des populations entières pour s’accaparer leurs territoires. Et en Australie, l’arrivée des colons britanniques a presque entièrement effacé les cultures aborigènes à travers des génocides et des politiques d’assimilation forcée.

Il est ironique de constater que ceux qui agitent aujourd’hui le spectre du « grand remplacement » se réclament d’une histoire qui a, elle-même, fondé son pouvoir sur l’éradication de peuples autochtones. Les vrais « remplacés » sont ces hommes et femmes qui habitaient des terres depuis des millénaires, porteurs de cultures riches et complexes, et qui ont été brutalement éliminés par les colons européens. Leurs descendants luttent encore aujourd’hui pour faire reconnaître ces crimes et restaurer leurs droits.

Au lieu de pointer du doigt les migrants d’aujourd’hui, accusés d’un « remplacement » imaginaire, il est grand temps d’affronter la réalité historique : le grand remplacement qui a véritablement eu lieu est celui orchestré par l’impérialisme européen, et ses cicatrices continuent de marquer notre monde contemporain.