Dans le monde de l’approche narrative, on assiste aujourd’hui à une étrange tendance : celle de découper des processus complexes en morceaux, et d’utiliser ces séquences comme des artefacts autonomes, indépendants de tout contexte.

L’arbre de vie, la lettre du futur, les moments étincelants, les poésies de documentation… Ces techniques séduisent, enthousiasment. Elles sont belles, puissantes, et quand un groupe les découvre, c’est comme une révélation.

Mais s’arrêter là, c’est oublier l’essentiel. Car empiler des vertèbres ne fait pas une colonne vertébrale. L’approche narrative, pour être véritablement transformative, ne peut pas se résumer à une série de recettes. Rien ne remplace une trajectoire métaphorique authentique, une histoire riche et étoffée, développée pas à pas depuis un point de départ judicieusement choisi. Un point de départ qui a pris en compte l’analyse politique du contexte, c’est-à-dire les rapports de pouvoir et de privilèges, et la réalité sociale et personnelle du client ou du groupe.

Bien sûr, il est tentant de se reposer sur des outils séduisants, de glisser vers un certain confort. Mais le confort est l’ennemi de la transformation radicale. Ce sont les détours, les tensions, les mystères et les résistances qui permettent de construire un récit cohérent, enraciné dans la réalité vécue. Méfions-nous donc de la paresse intellectuelle qui consiste à croire qu’un outil, aussi brillant soit-il, puisse porter en lui-même sa propre universalité. Une intervention narrative efficace est un chemin métaphorique, une trajectoire unique que rien de préfabriqué ne peut remplacer.