
Guy-Roger Duvert nous embarque dans une aventure intersidérale qui commence sur une Terre à bout de souffle, ravagée par les échecs répétés de l’humanité. La planète, devenue invivable à force de guerres, de virus et de pollution, voit une poignée de survivants prendre le large à bord de l’Arche, premier vaisseau destiné à coloniser une exoplanète prometteuse. Ça vous rappelle quelque chose?
Le voyage dure 80 ans. À l’arrivée, ce nouveau monde, sobrement baptisé Eden (rien que ça), promet un renouveau pour l’humanité. Mais, comme toujours, le rêve se complique dès que les premiers pas sont posés : Eden regorge de mystères et de dangers, et parmi eux, une surprise de taille… Des « humains », mais pas tout à fait. Ces nouveaux venus, bien que se revendiquant eux aussi de la Terre, évoluent selon des règles qui n’ont rien à voir avec les nôtres.
Ils sont clones, télépathes et soudés par une organisation sociale où l’individualisme n’existe pas. Chaque décision est prise pour la survie du groupe. Pas de héros, pas d’égos, juste une collectivité parfaitement huilée… Autant dire, une hérésie pour les colonisateurs terriens fraîchement débarqués, toujours pétris de leurs réflexes bien humains : liberté individuelle, instinct, erreurs – mais aussi solidarité spontanée et bravoure improvisée.
Le choc culturel entre ces deux visions du monde est au cœur du roman, et Duvert s’amuse à poser des questions qui résonnent fort : jusqu’où peut aller la liberté individuelle face aux besoins du collectif ? A-t-on le droit de coloniser une planète, sans se soucier de ceux qui l’habitent déjà, fussent-ils humains ou autres (car vous vous doutez qu’il y a déjà du monde sur Eden, une population apparemment primitive que nos amis militaires n’ont aucun scrupule à considérer comme des sauvages).
L’histoire, qui démarre comme un space opera classique – voire un peu trop classique au début – prend tout son envol avec l’arrivée du second vaisseau, technologiquement et socialement en avance sur l’Arche. Les interactions entre ces deux communautés sont passionnantes, et les personnages, un peu squelettiques au départ, gagnent progressivement en épaisseur. Mention spéciale aux militaires du récit, qui rappellent par leur cohésion les Marines de Starship Troopers : solidaires, pragmatiques, mais souvent aveuglés par leur discipline rigide. Cette unité « formatée » n’est pas sans évoquer les univers militaristes de Robert A. Heinlein, grand amateur de soldats intersidéraux et chantre d’une discipline parfois poussée à l’extrême.
Quant à l’écriture, elle est marquée par la rigueur de la hard science : précise, cohérente, mais parfois un brin sèche. Une inquiétude que j’avais dès les premières pages, où l’action semblait prendre le pas sur les personnages. Heureusement, Duvert redresse vite la barre, et on finit par s’attacher autant aux dilemmes des militaires qu’à l’impertinence des civils.
Je n’aurais probablement jamais découvert cette série sans le flair de certains blogs littéraires que je suis assidûment, comme celui de Lilou (Ma passion les livres), qui m’a convaincu avec une chronique précise et enflammée dans les coups de coeur 2024 des flingueuses de l’excellent Collectif Polar. Ces recommandations m’ont poussé à m’attaquer à cette série, et je ne regrette pas !
En bon space opera, Eden pose les bonnes questions et nous invite à réfléchir à nos travers : si nous détruisons notre planète, serons-nous capables de faire mieux ailleurs ? Spoiler : l’histoire laisse entendre que nous sommes surtout doués pour répéter les mêmes erreurs.
Avec une intrigue qui gagne en intensité et des thèmes riches, Eden se lit d’une traite, et la fin donne envie d’enchaîner directement avec le tome 2. Une série en quatre volumes qui plaira aux amateurs de SF classique, à la croisée de Van Vogt et Heinlein.
Et pour ceux qui espéraient qu’Elon Musk ait le temps de sauver l’humanité avant qu’on finisse de bousiller la Terre… Je vous conseille de lire ce livre avec un brin d’autodérision.
Là nous somme d’accord ! 😉🤩
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Si ce n’est pas une jolie piqûre de rappel ! Audrey m’en avait déjà dit le plus grand bien et c’est chouette aussi les récits classiques qui nous rappellent pourquoi on s’est mis à apprécier un genre.
Vendu et ajouté à ma wishlist !
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Tu vas voir, il faut un peu s’accrocher sur les 50 premières pages mais après ça démarre bien !
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Il est noté en haut de ma wishlist »commande en librairie », c’est dire si je te fais confiance 😉
Mais je note cet avertissement qui sera des plus utiles !
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