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Comment rétrécir les dragons

~ Fantasy, SF, jazz et thérapie narrative

Comment rétrécir les dragons

Archives de Catégorie: Nouvelles errances narratives

Y a t-il un bug humain ?

24 lundi Fév 2025

Posted by Pops White in Fiction, Nouvelles errances narratives, Paysages de l'imaginaire

≈ 10 Commentaires

Les civilisations humaines recommencent inlassablement les mêmes erreurs : de Outsphere (tomes 2, 3 et 4) à Marie-Antoinette, en passant par Retour vers la Terre, c’est la même histoire navrante du singe cruel qui se suicide par avidité.

Il y a quelque chose de fascinant – et de désespérant – à observer comment les sociétés humaines, quelles que soient leurs origines ou leurs contextes, semblent condamnées à répéter les mêmes erreurs. Trois œuvres aux registres très différents, offrent un miroir troublant de cette tendance : les tomes 2, 3 et 4 de la saga Outsphere de Guy-Roger Duvert, le cycle Terre des Origines d’Orson Scott Card et la production télévisée Marie-Antoinette diffusée sur Canal+. Trois salles, mais une seule  ambiance.

D’un côté, Outsphere, une saga dont nous avions chroniqué le premier volet ici-même. Les opus suivants nous plongent dans une colonisation spatiale où des survivants de la Terre tentent de rebâtir une civilisation sur une planète lointaine mais avec la merveilleuse idée de stases cryogéniques pour certains des personnages principaux, qui permet d’observer l’évolution de la société sur une période longue et de voir comment la peur, l’avidité et les religions plongent cette nouvelle humanité dans les mêmes ornières qui ont conduit les « anciens » à quitter une terre qu’ils avaient pressée comme un citron (toute ressemblance, etc ).

Ceci nous rappelle Terre des Origines, passionnante saga d’Orson Scott Card suit les descendants des colons de la planète Harmony, confrontés à la nécessité de revenir sur leur planète d’origine, la Terre, qu’ils avaient fuie pour éviter leur propre extinction. Sur Harmony (la planète des colons d’Outsphere s’appelant pour sa part Eden), un superordinateur nommé Surâme (Oversoul) veille à orienter le développement de la nouvelle humanité et brider ses tendances autodestructrices. Mais au bout de 40000 ans, considéré comme un Dieu, il commence à se mélanger les octets…

Enfin, Marie-Antoinette nous rappelle, à travers une reconstitution historique certes américaine et peu regardante sur la vérité historique et certes pimentée de romance young adult, mais de bon aloi et agréable à regarder, à quel point l’ancien régime était miné par ses propres contradictions, aveuglé par ses rituels de classe et ses privilèges, incapable de voir venir la Révolution jusqu’à ce qu’il soit trop tard. On a vu les résultats de la fameuse révolution, un bain de sang qu’on nous a vendu depuis l’école primaire comme le summum de l’humanisme.

On aurait pu croire qu’en repartant de zéro, l’Homme apprendrait enfin de ses erreurs. Mais non. L’histoire ne se réécrit jamais, elle se répète comme dans Un jour sans fin.

Dans Terre des Origines, l’ironie est encore plus cruelle. Les colons d’Harmony, censés avoir fui la Terre pour lui laisser le temps de se régénérer après l’effondrement, finissent par recréer exactement ce qu’ils cherchaient à fuir. Leur société, pourtant assistée par une intelligence artificielle quasi divine, retombe dans l’autoritarisme et la division, démontrant que la technologie ne suffit pas à changer la nature humaine. Mais existe t-il une nature humaine ? Michael White a lutté contre cette idée jusqu’à sa mort, je le revois encore en séminaire nous demander « qui parmi vous a une nature humaine ? » Et je revois les mains qui se lèvent (dont la mienne j’avoue).


Pourquoi les sociétés occidentales basées sur la conquête, l’exploitation et le vol échouent-elles systématiquement à changer d’histoire et écrire une version alternative de leur récit identitaire ?
Il y a, dans ces récits, une leçon à tirer résumée par Tristan Bernard : « l’humanité qui devrait avoir des millénaires de sagesse retombe en enfance a chaque génération ». Chaque génération croit qu’elle est différente, qu’elle fera mieux que les précédentes, mais elle hérite des mêmes instincts, des mêmes biais, des mêmes luttes de pouvoir. Du même bug.

Alors, faut-il en conclure que nous sommes irrémédiablement condamnés à refaire l’histoire, comme un disque rayé ? Peut-être. Mais si la fiction a un rôle, c’est bien celui de nous donner l’opportunité de voir ces mécanismes à l’œuvre… et, qui sait, d’apprendre enfin à les déconstruire.

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